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Article 2: Le marché n’est pas l’unique déterminant du coût du stationnement

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Mon premier texte sur le stationnement portait sur l’importance de tarifer le stationnement pour assurer la vitalité du commerce, ainsi qu’une meilleure organisation de la ville. Nous avons vu comment le modèle de Donald Shoup favorise l’acceptation sociale du coût du stationnement en tarifant « au prix juste ». Cette nouvelle forme de tarification pourrait nous permettre d’ajouter des parcomètres dans des arrondissements qui hésitent à payer le prix politique.

Comme annoncé, j’aimerais aussi profiter de l’occasion pour adresser quelques critiques à la théorie de Donald Shoup. J’aimerais vous prévenir tout de suite: je ne suis pas urbaniste, ni économiste. Mon opinion est basée sur les nombreuses lectures que j’ai faites sur le stationnement, mais je n’ai pas lu tout ce qui existe sur la question et je n’ai pas le bagage scientifique nécessaire pour élever ce texte en un article scientifique. Ce texte s’adresse à ceux et celles qui s’intéressent au « parking » et à la théorie de Donald Shoup.

  1. La théorie de Shoup ne tient pas compte des coûts liés à l’usage de l’automobile

La théorie de Donald Shoup est un modèle de gestion de l’offre de stationnement dans un contexte de rareté. Concrètement, plus la demande pour le stationnement est élevée, plus le prix augmente. Si la demande est faible, le prix doit baisser afin d’inciter les consommateurs à venir utiliser les espaces à rabais. Si on résume, l’équation du prix du stationnement tient uniquement compte de l’offre (les espaces de stationnement) et de la demande (le nombre de consommateurs cherchant un espace de stationnement). L’équilibre est trouvé par le prix que le consommateur est prêt à payer pour un espace donné dans un contexte de rareté.

Malheureusement, le stationnement n’est pas qu’une simple question d’offre et de demande.

En effet, Donald Shoup ne tient pas compte des coûts fixes liés au stationnement et de façon plus générale, à l’utilisation de la voirie. Ces coûts fixes sont: la pollution, la dégradation de l’environnement, la sous-évaluation de l’espace public, les problèmes de sécurité, la dégradation des infrastructures, le déneigement, le nettoyage, la propreté, le marquage, etc. Je crois qu’il faut tarifer en partie ces coûts dans le stationnement et qu’ils doivent entrer dans l’équation lors de la facturation des espaces de stationnement.

Je ne crois pas pour autant que la théorie de Shoup est mauvaise puisque je crois fermement qu’il faut optimiser l’usage du stationnement en tenant compte des réalités du marché. Facturer les coûts fixes pourrait déséquilibrer le marché et invalider sa théorie qui mène à l’équilibre: un coût trop élevé du stationnement réduira la demande. Moins de clients, moins d’argent. Les commerces ferment et nous sommes tous perdants.

Où facturer ces coûts fixes? J’ouvre une parenthèse pour donner mon avis sur cette question.

Il existe deux façons de tarifer les automobilistes pour les coûts qu’ils engendrent à la société. Les taxes « de mobilité » qui visent les comportements et les taxes « fixes » qui ont peu d’effet sur les comportements. L’exemple même d’une taxe « de mobilité », c’est le péage : l’objectif est de tarifer selon la distance parcourue afin d’éviter l’usage de l’automobile sur de longues distances et pour dissuader l’étalement urbain. Une taxe « fixe », c’est la taxe sur l’immatriculation. L’objectif n’est pas de changer un comportement, mais d’aller chercher des revenus.

Par contre, j’insiste pour être réaliste et vous dire tout de suite que les arrondissements ne verront jamais l’argent de ces types de taxes. En effet, les arrondissements ne sont pas à la table lorsque les autres paliers de gouvernement se partagent ces sommes. À mon avis, si les arrondissements ont uniquement comme pouvoir de tarifer le stationnement, ils ne devraient pas se priver pour le faire parce que dans le monde de la gestion publique, c’est chacun pour soi. Il faut prendre l’argent où il est afin de financer les infrastructures. Ce n’est pas un secret de dire que les arrondissements de Montréal n’investissent qu’une infime partie des sommes nécessaires à l’entretien normal des infrastructures routières.

  • Les taxes fixes devraient servir aux coûts fixes liés à l’utilisation de l’automobile. L’argent devrait donc servir à entretenir les infrastructures et à favoriser des initiatives environnementales.

  • Les taxes comportementales devraient servir à financer le transport en commun.

J’en profite pour ouvrir une deuxième parenthèse: les détracteurs de la tarification du stationnement vont dire qu’ils ne doivent pas être les seuls à financer les routes puisqu’ils ne sont pas les seuls usagers. En effet, à pied, à vélo ou en transport en commun, nous avons besoin d’une voirie publique efficace. C’est la même chose pour le transport des marchandises: le brocoli au Metro n’arrive pas sur les étalages grâce à une soucoupe volante.

J’aimerais toutefois tempérer cet argument en rappelant que les routes actuelles sont des routes conçues pour l’automobile. Les rues que nous connaissons n’ont rien à voir avec l’esprit d’une « une voie publique ». En effet, l’espace utilisé par la voiture est parfois totalement disproportionné par rapport aux autres usagers de la route. Suffit de se rendre sur Mont-Royal la fin de semaine pour s’en rendre compte. Prenons aussi comme exemple la rue Brébeuf où les cyclistes dominent clairement en nombre par rapport aux automobilistes. Lorsque je parle de voie publique, je propose un changement de paradigme: certaines rues pourraient être conçues pour accommoder d’abord les piétons et les cyclistes avant d’être qu’un simple tuyau pour faire passer des chars.

Sauf que la réalité que nous connaissons, c’est que les rues sont d’abord conçues pour l’auto. Il m’appairait donc normal que les automobilistes assument une partie de la facture.

Alors, comment facturer une partie des coûts fixes aux automobilistes sans pour autant briser radicalement l’équilibre et mettre en danger les commerces? La réponse se trouve dans les modèles économiques: il faut tenir compte de l’élasticité de la demande par rapport au prix.

En principe, une augmentation du prix entraîne une baisse de la demande et une baisse des prix entraîne une augmentation de la demande. Par contre, il serait erroné de prétendre qu’il s’agit d’une relation directement proportionnelle: c’est le phénomène de l’élasticité. Si une augmentation du prix du stationnement entraîne une faible variation de la demande, on parle alors de faible élasticité. Donc, une augmentation du prix de 1% pourrait entrainer une diminution de l’usage des parcomètres de 0,5% (ces chiffres servent d’exemple uniquement). Je propose donc d’utiliser le phénomène d’élasticité pour tarifer les coûts fixes de l’usage de l’automobile dans le prix du stationnement. Évidemment, tous les économistes vont dire que la gestion par l’élasticité n’est pas une solution à long terme (il y aura, tôt ou tard, un backlash du marché), mais c’est une façon crédible d’aller chercher quelques dollars de plus sans pour autant affecter négativement la vitalité économique.

  1. La rue commerciale de Donald Shoup n’existe pas

La théorie de Shoup, c’est avant tout une théorie micro. Elle analyse l’effet du prix du stationnement sur la demande des usagers dans un environnement donné. Malheureusement, cet environnement n’existe pas dans la réalité.

  • Le stationnement gratuit sur les rues résidentielles à proximité des artères commerciales fausse totalement la donne

  • Le modèle de Shoup ne tient donc pas des automobilistes qui se cherchent une « free ride »

  • Il faut donc intervenir sur les rues résidentielles pour limiter le nombre de passagers clandestins en tarifant à leur tour ces rues ou en augmentant considérablement le nombre de stationnements réservés aux résidants.

Vous aurez donc compris que nous sommes devant un choix si nous souhaitons que le modèle de Shoup fonctionne. C’est d’ailleurs une des raisons qui nous a poussés à inventer le Parcojour. Vous verrez dans le prochain article comment le Parcojour est le modèle le plus efficace pour éviter les  »free ride » sur les rues résidentielles, tout en optimisant l’offre de stationnement pour tous les usagers.

  1. La théorie de l’offre et de la demande fonctionne uniquement lorsque l’agent économique possède toutes les informations nécessaires pour faire un choix éclairé.

Imaginez que vous cherchez un espace de stationnement sur Mont-Royal. Selon la théorie de Shoup, le prix varie selon la demande. Le tronçon A est donc à 1$/h, le tronçon B est à 2$/h et le tronçon C est à 3$/h. Si vous agissez en « agent économique » qui répond parfaitement aux principes de l’économie de marché, vous irez vous stationner dans un espace à 1$/h. Mais j’ai une question: comment avez-vous appris que l’espace de stationnement du tronçon A était le moin cher?

La réalité, c’est qu’il n’y a qu’une seule façon d’obtenir cette information et c’est avec des téléphones intelligents ou par ordinateur de bord. Malheureusement, je parie que le taux de diffusion de ce type de technologie n’est pas encore assez élevé pour faire de nous des consommateurs avertis. San Francisco tente l’expérience, j’ai hâte de connaître les résultats. Pour l’instant, c’est un gros bémol à la théorie de Shoup.

  1. La préférence des consommateurs

Selon les adeptes du libéralisme, le consommateur cherche le prix le plus bas pour un bien ou un service. Malheureusement pour les apôtres de l’économie de marché, les consommateurs ne sont pas des acteurs économiques rationnels. Par exemple, certains automobilistes n’ont pas comme critère le prix, mais la distance à parcourir entre leur automobile et la porte du commerce. On peut donc imaginer qu’un client puisse ralentir le trafic et attendre qu’un espace se libère, même si le prix du stationnement est 5 fois plus cher là où il veut se garer que la moyenne sur la même rue. D’autres sont prêts à payer un prix de fou pour pouvoir garer leur belle voiture devant un resto branché. Évidemment, je ne dis pas que c’est la majorité qui agit de façon irrationnelle, mais la donnée est suffisamment importante pour venir fausser la logique derrière la théorie de Shoup.

  1. L’offre: le stationnement ne s’insère pas dans une logique de marché, mais dans une situation de quasi-monopole.

Je ne voudrais pas tomber dans une analyse micro de la question du stationnement. Si l’Avenue Mont-Royal avait le monopole du commerce et que l’arrondissement possédait le monopole du stationnement, nous pourrions augmenter les prix de façon très importante. Évidemment, ce n’est pas le cas et je dirais même que je suis d’accord pour dire que l’augmentation importante des centres d’achats en banlieue et des stationnements gratuits qui les accompagnent peuvent devenir réellement problématiques pour les artères commerciales urbaines.

Par contre, certaines caractéristiques du Plateau-Mont-Royal font en sorte que nous possédons un nombre critique de commerces qui ne peuvent émerger ailleurs. Bref, tout le monde reconnaît qu’il y a des choses qui ne se retrouvent nulle part ailleurs que sur le Plateau ou dans les quartiers centraux. Au final, il faut absolument se déplacer sur le Plateau pour obtenir ces biens et services. Puisque l’arrondissement et la ville possèdent un quasi-monopole sur le stationnement et que certains consommateurs n’ont d’autre choix que d’utiliser ces espaces, il est possible d’imposer un prix légèrement plus élevé. Attention, je tiens tout de même à spécifier que je suis d’accord avec Shoup et les commerçants qu’il faut être prudent à ce jeu là. Il y a à peine quelques années, il était impossible de trouver une bonne table en banlieue et des produits moindrement spécialisés. Bref, il ne faut pas trop tirer sur l’élastique.

Demande: Crise de la demande

Plusieurs facteurs peuvent venir affecter les commerçants. J’admets que le prix du stationnement a un effet. Les crises économiques, une nouvelle concurrence, la dépréciation de certains secteurs d’activités pèsent aussi dans la balance. Bref, le prix du stationnement n’est pas l’unique élément qui favorise la vitalité commerciale: entre 9% et 18% de la clientèle fréquente l’Avenue Mont-Royal en voiture. C’est marginal.

Malgré tout, je ne suis pas contre le fait qu’un maximum d’automobilistes fréquente les artères commerciales en voiture. Je suis évidemment tout à fait d’accord avec l’idée d’augmenter la demande pour les biens et services de nos commerces pour qu’ils prospèrent, même grâce à la voiture. Par contre, je ne crois pas que la demande pourrait exploser grâce à des tarifs de stationnement avantageux, mais bien grâce à la création d’une demande « artificielle ».

Ce que je propose, c’est la recette appliquée depuis longtemps par des agences de marketing qui travaillent chaque jour pour créer la demande, la modifier, la faire évoluer, la publiciser, etc. Les préférences des consommateurs ne sont pas les mêmes: l’économie, ce n’est pas un consommateur-type qui achète un produit X au prix le moins élevé. La vie n’est pas un Dollorama. Il faut investir et miser sur ce qui nous distingue et qui fait notre renommée.

Prenons un exemple concret: Starbuck. Il faut être fêlé pour payer 5$ pour un café, alors que le prix du marché tourne autour de 1,50$. Par contre, les gens sont prêts à payer pour « l’expérience Starbuck » en profitant des divans, de l’ambiance, du décor, etc.

Comme Michel Depatie le comprend très bien, l’avantage du Plateau, c’est cette « expérience ». Il faut créer des personnalités uniques et fortes pour chacune de nos artères commerciales. Grâce à des avantages que la banlieue n’aura jamais (densité, artistes, cadre bâti, etc.) nous sommes capables de garder une bonne longueur d’avance sur les « 10-30 » qui essaient de nous copier. Par contre, pour garder cette longueur d’avance, il ne faut pas s’asseoir sur nos lauriers et il faut constamment investir sur les artères grâce à des projets concrets et il faut chercher des débouchés pour se distinguer. Je ne parle pas de faire appel à Clotaire Rapaille, à Richard Florida ou à une autre firme qui produit des études qui prennent la direction des tablettes: je parle d’investissements majeurs, du concret, des projets mobilisateurs qui changent la personnalité de la rue. Luc Ferrandez proposait environ 400 000$ par année pour l’Avenue Mont-Royal. Sur 10 ans, c’est 4 millions de $. Laissez-moi vous dire qu’avec 4 millions d’un côté et la participation de l’arrondissement de l’autre, on aurait fait de grands projets sur cette avenue. Des rues commerciales uniques, dans un arrondissement unique, voilà l’objectif final du Plan stationnement du Plateau.

Vous comprendrez qu’il est tout à fait approprié de « fausser » la demande en créant une demande distinctive: pas pour du stationnement, mais pour une expérience de magasinage exceptionnel. En insérant de l’argent dans le parcomètre, on espère obtenir un après-midi dans des boutiques qui ne se trouvent nulle part ailleurs pour ensuite passer le reste de la journée dans un réseau vert, à arpenter les parcs ou à flâner sur les places publiques.

Donc, contrairement à Shoup, je crois que le prix du stationnement peut être plus élevé que le prix du marché puisque le consommateur ne répond pas totalement à la logique « rationnelle » de l’offre et de la demande. En effet, les clients sont prêts à payer pour des avantages immatériels, pour une expérience unique. Réduire le tout à un histoire de prix, c’est faire fausse route.

En guise de conclusion, j’estime que si Starbuck est capable de vendre du café à 5$, je crois que le Plateau est capable de vendre du parking à 3 piastres.

Prochain article: Le Parcojour, mettre fin à la tragédie des biens communs.


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